Stop Mercosur : les comités locaux Attac de Bretagne écrivent aux collectivités
- Le 18/11/2020
- Dans Agir avec Attac
Les Comités Attac de Bretagne (Côtes d’Armor, Finistère, Rennes, Pays malouin – Jersey, Vitré, Morbihan-Vannes) ont décidé d’un commun accord d’interpeller les collectivités en leur demandant de voter une résolution dénonçant les conséquences néfastes de ce traité pour l’agriculture, l’environnement et la démocratie. Le courrier ci-dessous a été adressé au président de la région Bretagne ainsi qu’aux présidents des Conseils Départementaux.
Rappel des derniers épisodes
Les déclarations contradictoires du gouvernement français
En juin dernier, devant les 150 membres de la Convention citoyenne pour le climat, Emmanuel Macron avait indiqué « avoir stoppé net les négociations avec le Mercosur ».
Le vendredi 18 septembre, suite à la remise d’un rapport d’évaluation relativement critique sur l’accord de libéralisation du commerce entre l’UE et les États du Mercosur, le gouvernement a d’abord laissé entendre qu’il s’opposait à cet accord : « il n’y aura pas d’accord au détriment de notre planète » a affirmé la ministre de la transition écologique Barbara Pompili.
Le mardi suivant, Franck Riester, ministre du commerce extérieur, laissait pourtant la porte ouverte en indiquant ne « pas vouloir bloquer toute démarche » et « jeter à la poubelle 10 ans de travail ».
Suite à la campagne lancée par le collectif Stop CETA-MERCOSUR, Attac Pays malouin – Jersey a participé à l’interpellation des autorités sur la nécessité de refuser d’enclencher la ratification du traité. Près de 100 000 messages ont été envoyés à Emmanuel Macron, et aux ministres Jean-Yves Le Drian, Franck Riester, Clément Beaune et Julien Denormandie pour les exhorter à prendre les dispositions nécessaires afin d’obtenir l’abandon de l’accord UE-Mercosur à Bruxelles
Une mobilisation d’organisations européennes
En juin 2019, plus de 340 organisations avaient appelé l’UE et ses États-membres à interrompre immédiatement les négociations commerciales avec le Mercosur au nom de ses impacts sur les agricultures et paysans européens, de l’aggravation de la déforestation en Amérique du Sud, de ses effets nocifs sur le climat et la planète.
Une première victoire…
C’est ce lundi 9 novembre que les ministres du commerce des pays de l’UE, réunis en vidéoconférence, devaient enclencher le processus de ratification de l’accord de libéralisation du commerce entre l’UE et les pays du Mercosur (Brésil, Argentine, Uruguay et Paraguay). Cela n’est pas le cas : alors que la présidence allemande de l’UE en avait fait une priorité, aucun vote n’a eu lieu en raison des trop vives oppositions exprimées dans de nombreux pays y compris au sein de plusieurs Parlements nationaux (Autriche, Wallonie, Pays-Bas, Irlande).
Jamais un accord de libéralisation du commerce n’avait été aussi contesté : près de 80% des personnes interrogées dans plusieurs pays européens veulent que l’accord UE-Mercosur soit abandonné (1). La mobilisation citoyenne et le rejet de cet accord "voitures contre bétail", empêchent aujourd’hui la Commission européenne et les lobbys économiques de parvenir à leurs fins.
… mais le combat n’est pas terminé.
Ce lundi 9 novembre, plus de 190 économistes expliquent dans une lettre ouverte combien les données produites par la Commission européenne pour justifier des gains économiques attendus d’un tel accord sont fragiles, alors que d’autres études « montrent que l’impact net réel de la libéralisation du commerce sur les revenus, l’emploi, la productivité du travail, l’innovation et la compétitivité pourrait bien être négatif ». Ils appellent la Commission à mener une étude d’impact plus sérieuse.
Pour autant, beaucoup de décideurs européens cherchent encore à sauver l’accord UE-Mercosur et envisagent annexes ou autres ajouts à la marge dans une tentative désespérée de rassurer sur des sujets comme la déforestation. C’est hors de question : il faut abandonner ce projet d’accord avec le Mercosur et, avant toute chose, réviser en profondeur la politique commerciale européenne. L’heure n’est plus celle d’une mondialisation qui fait de l’intérêt des multinationales un objectif supérieur aux droits des populations et à la protection de la planète.
Courrier adressé aux collectivités des 4 départements bretons et à la région
Saint-Malo le 9 novembre 2020
Le comité local Attac des Côtes d’Armor
Le comité local Attac du Finistère
Le comité local Attac de Rennes
Le comité local Attac de Saint-Malo
Le comité local Attac de Vitré
Le comité local Attac du Pays de Vannes
à
M…
Au moment où les promesses de « relocalisation » et de régulation de la mondialisation, pourtant nécessaire à nos territoires, sont progressivement mises en sourdine, l’accord UE-Mercosur -largement rejeté par l’opinion publique- est encore loin d’être enterré. Les ministres du commerce des États-membres de l’UE ne veulent pas, selon les propos de Franck Riester, Ministre délégué chargé du commerce extérieur et de l’attractivité, « jeter à la poubelle 10 ans de travail ».
Le traité du Mercosur, s’il était adopté, contribuerait au développement d'un marché mondialisé, néolibéral et insoutenable, entraînant des mesures xénophobes et nationalistes vers lesquelles s’orientent déjà de plus en plus de gouvernements. Nous devons choisir une autre voie, celle de la relocalisation écologique et solidaire s'appuyant sur une forte solidarité internationale.
Pour cela, les États, collectivités territoriales et populations doivent disposer des moyens législatifs, juridiques, fiscaux et économiques leur permettant de définir leurs besoins et la manière de les satisfaire. Les règles et institutions en matière de commerce et d'investissement doivent être profondément revues afin de protéger les secteurs portant sur les besoins fondamentaux (santé, logement, éducation, accès à l'eau, énergie et alimentation). Pour autant, la relocalisation ne signifie pas la fin de tout commerce international, mais celui-ci devra, dès lors, être fondé sur la complémentarité, la coopération et la solidarité.
Il convient donc d’accroître la pression afin que l’accord UE-Mercosur soit purement et simplement abandonné, et que la politique commerciale européenne soit revue en profondeur.
S’opposer à cet accord :
- c’est agir pour relocaliser la production de denrées alimentaires. La nourriture doit être produite aussi localement que possible. Cela nécessite une politique agricole et commerciale qui donne la priorité, dans le monde entier, aux systèmes agro écologiques locaux et les renforce, qui ne détruise pas le climat ni la biodiversité et qui soit basée sur des droits sociaux protecteurs.
- c’est agir pour relocaliser la production de biens essentiels autant que cela est possible et pertinent du point de vue environnemental, tout en aidant les pays du Sud à développer leurs propres productions. En particulier, la production des biens essentiels du quotidien, ainsi que les conditions nécessaires pour assurer des services publics de haute qualité, doivent l'être sur des bases régionales et dans le respect de normes environnementales strictes et de droits sociaux et du travail élevés.
- c’est re-municipaliser et/ou renforcer les services publics locaux afin de garantir une haute qualité de service pour un coût abordable à toutes les populations, pour l'eau, l'assainissement, la santé, l'éducation ou encore les transports. Cela implique que les services publics soient exclus des accords de libéralisation du commerce, que les cadres juridiques existants donnent aux autorités locales la possibilité d'agir en ce sens et qu'elles disposent des ressources nécessaires pour le faire.
- C’est œuvrer pour que les pouvoirs publics puissent inclure une préférence pour les fournisseurs locaux dans la passation des marchés publics. Donner aux collectivités territoriales le droit de décider par elles-mêmes permettra aux marchés publics de devenir un puissant soutien à la relocalisation de nos économies afin de satisfaire les besoins des populations.
Nous vous remercions par avance de présenter et d’adopter la résolution ci-jointe lors de votre prochain conseil afin d’assurer l’équilibre économique, écologique et social de notre territoire.
Les comités locaux Attac de Bretagne