Sans états d'âme, avec lucidité…

Ce qui vient de se passer aux USA, le sinistre retour de Trump, y compris à travers le “vote populaire”, c'est-à-dire le suicide de la démocratie par les voies démocratiques, doit nous interroger sur les moteurs des processus qui l'ont permis.

À l'image de ce qui est advenu dans les années 30, et dans un contexte où les modes d'information, d'influence et de propagande ont acquis une puissance incommensurable, ces processus, aujourd'hui, ne sont que partiellement rationnels. Or nous, notre génération de "boomers" en particulier, continuons à penser, à la suite des Lumières, que la rationalité guide les choix individuels et collectifs. Nous ne devons pas, bien sûr, abandonner ce terrain de la raison comme fondement démocratique, aucun doute là-dessus, cela doit rester clair.

Si on veut rester lucide force est de constater aussi qu'en matière politique, aligné désormais sur le domaine de la consommation, ce paradigme s'est largement dégradé, sinon même dissous, dans des méga-machines informationnelles. Ces dernières jouent sur le “neuro-marketing”, les pulsions élémentaires, la peur, l'effet “Waow”, des promesses infantiles de jouissance immédiate, etc. dans un type de société et de socialisation débilitantes, celle qu'annonçait le Situationniste Guy Debord dans son ouvrage prophétique, la "Société du spectacle".

Articuler un discours et une pratique politique de gauche qui prennent en compte cette réalité des "émotions" sans démagogie et manipulation est un défi immense. Visiblement, le “populisme de gauche” post-marxiste, inspiré de Chantal Mouffe et de Ernest Laclau, ne suffira pas.

En un sens on peut s'interroger sur la stratégie qui consiste à opposer une radicalité à une autre, un populisme assumé à un autre, ou à incarner la colère par la colère, (« Je suis le bruit et la fureur, le tumulte et le fracas, celui de notre temps de notre époque, c'est l'heure des caractères », vidéo 2010.

Même avec un vrai programme d'émancipation politique et de planification économique, tout cela ne suffira pas à regagner l'hégémonie culturelle dont la Gauche – si elle est unie – a besoin pour espérer gouverner notamment, en tenant compte des réalités environnementales (totalement absente des élections états-uniennes). Il y a "du grain à moudre" comme disait l'autre…

Sans états d'âme, avec lucidité, nos associations, impliquées comme elles le sont, dans les réalités locales vont sans doute devoir tirer des enseignements de ce qui vient de se produire aux États-Unis. À Saint-Malo comme ailleurs, et la participation de notre comité local au sein du collectif Le Monde d'Après en est une bonne illustration, elles (= les associations) doivent inlassablement continuer à proposer aux autres acteurs de notre démocratie (partis politiques, corps intermédiaires, mouvements sociaux, etc.) des réflexions et des inflexions sur les formes et les pratiques politiques adaptées à notre temps, le chantier continue !

 


 

Démocratie