Extractivisme ou activisme ? Lannion fait la force !
- Le 29/06/2016
- Dans Evénements
Dans la droite ligne de la conférence d'Attac sur l'extractivisme, une cinquantaine de militants se sont rassemblés devant le siège du groupe Roullier à St Malo pour soutenir les collectifs en lutte contre l'extraction de sables coquillers en baie de Lannion.
Un membre d'Attac était présent et a mis son grain de sel et son grain de sable, voici en exclusivité les notes de son intervention.
Au nom d’Attac Pays Malouin Jersey, je vous réaffirme notre soutien à la lutte des Associations contre ce projet.
J’ai découvert le problème récemment, je suis allé voir sur la toile pour me documenter comme tout citoyen peut le faire, je veux juste partager quelques remarques qui me sont venues alors.
1) Quels sont les enjeux, qu’est-ce qui est en balance, dans ce projet.
Localement, Associations et élus sont contre. Alors qui est pour ?
La Compagnie Armoricaine de Navigation, filiale du groupe Roullier, bien sûr. Ça fait du chiffre d’affaire, même si dans ses 3 milliards de CA, ce n’est qu’un grain de sable !
Ce groupe affiche des préoccupations d’ « agriculture raisonnée » ! Qu’y a-t-il de raisonné dans l’utilisation des terres pour des productions qui ne correspondent pas aux sols, qui obligent à les modifier ? Et surtout, qu’y a-t-il de raisonné à devoir pallier artificiellement à une acidification des sols due essentiellement à l’adjonction immodérée de fertilisants ! On est là dans le cercle vicieux habituel : on détruit la nature et on marchandise un produit pour y remédier !
L’extraction prévue fera fuir les lançons ? Qu’à cela ne tienne, on inventera bien un substitut artificiel, pourquoi pas des croquettes pour les macareux, les bars et les autres ! Vous pouvez appliquer ce mécanisme au climat, vous trouverez tout ce que les ingénieurs inventent pour continuer à polluer tout en dépolluant moyennant finance. ça fait du PIB, tout ça, c’est bon pour le commerce !
En somme, le bénéficiaire principal, c’est l’agrobusiness spécialiste de la nourriture artificielle. C’est un intrant de plus dans son catalogue et c’est bien dans sa logique de faire pousser n’importe quoi n’importe où, en transformant les sols quand elle ne les supprime pas avec des cultures hors-sol !
Cela fait bien peu de bénéfices au regard d’un déficit net d’emploi et d’un saccage de l’écosystème et des paysages.
2) Deuxième remarque : au nom des intérêts d’une grosse entreprise, l’Etat bafoue encore une fois la démocratie en tentant de passer en force contre une population, avec son lot d’études bidon, de conflits d’intérêt et de mise à l’écart du principe de précaution.
Etudes bidon ? Le rapport de la mission d’inspection de février 2015 faite par deux spécialistes de la mer : un ingénieur des ponts et des eaux et forêts, et un ingénieur des mines ! Une sorte de Dupond et Dupont, enfin Dupont et Desmines ! De toute façon, vous me direz, ce rapport n’est qu’un collationnement d’écrits, ils n’avaient pas le temps pour voir sur place ! Ce rapport est manifestement un compromis du genre « on ne sait pas, mais rien ne prouve que… », ou « On ne peut pas mesurer les conséquences, alors on réduit le projet ». Une simple négociation entre le ministère de l’écologie et le ministère des finances.
Conflits d’intérêt ? C’est l’entreprise qui fait les études d’impact, des cabinets payés par l’entreprise qui réalisent les études complémentaires, et les organismes publics ratifient. Même si le rapport avoue que l’étude d’impact est incomplète, qu’il y a des désaccords sur la méthodologie employée, sans parler des incertitudes reconnues. Mais c’est probablement l’entreprise qui fera aussi le bilan à 5 ans, on a hâte de voir le résultat !
Principe de précaution ? En citant la charte de l’environnement, le rapport conclut :
« l’administration propose des mesures visant à anticiper tout dommage irréversible, à mesurer concrètement la nature et l’étendue des dommages éventuels et à arrêter au besoin ceux-ci ».
Ces mesures, c’est une simple limitation du projet et de voir ce que ça donne. On réinvente le principe de post-caution ! A l’américaine…
Quant à la concertation, le rapport indique que le dialogue a été difficile. Pas étonnant quand on se fiche que les 13 communes concernées ont dit non lors de l’enquête publique ! Le commissaire enquêteur, lui, dit oui ! Conclusion : on lance le projet en le réduisant un peu et en espérant nous faire taire en nous mettant devant le fait accompli !
ce qui m’amène à mon dernier point :
3) Enfin, je voudrais constater que, dans l’affaire, les vrais experts, c’est vous, les associations qui avez étudié le projet à la loupe et dénoncés ses impacts niés ou minimisés par les experts officiels. Alors, quand tiendra-t-on enfin compte de l’expertise collective des citoyens organisés ?
Il faudra y songer dans une future république plus démocratique !