J.M. Le Pen : Le faux Menhir était une vraie girouette
- Le 05/02/2025
- Dans Editorial
Dans ses archives un de nos lecteurs a retrouvé une référence aux interventions du Député Le Pen à l’Assemblée Nationale sous l'étiquette de l'UDCA (Union de défense des commerçants et artisans), le groupe poujadiste qu'il avait rejoint à 27 ans en 1956. Cet épisode fondateur de son parcours politique mérite notre attention pour déconstruire le mythe d’un Le Pen dont le parcours aurait été linéaire et dont le discours aurait été constant concernant les menaces que représenteraient l’immigration et l’Islam.
Au milieu du déluge d’articles parus ces dernières semaines dont la plupart n’apportent rien à la connaissance de ce sinistre personnage, il peut être pertinent de rappeler ce fait: si l’ancien para du 1er Régiment Étranger de Parachutistes (REP) de la Légion Étrangère fut d’abord un partisan de l’Algérie française au point de défendre et de pratiquer la torture en 19571, il fut aussi - et cela est moins connu - un « théoricien » du maintien, quoi qu’il en coûtât, de l’Algérie au sein de la France.
On trouve dans ce discours de 1958 des propos stupéfiants venant de celui qui incarnerait quelques années plus tard – et jusque à son dernier souffle – la lutte ethno-nationaliste contre le Grand Remplacement, même s’il fallu attendre Renaud Camus en 2010 pour voir le terme apparaître.
Nous remercions le lecteur qui nous a transmis le texte qui suit, paru au Jounal Officiel en date du 28 janvier 1958 (J.O. Débats p.309), dans lequel J.M. Le Pen offrait une « solution » pérenne au « problème de l’immigration algérienne » en suggérant à la Représentation Nationale d’accorder purement et simplement la pleine et entière nationalité française aux Algériens.
« Ce qu'il faut dire aux Algériens, ce n'est pas qu'ils ont besoin de la France, mais que la France a besoin d'eux. C'est qu'ils ne sont pas un fardeau ou que, s'ils le sont pour l'instant, ils seront au contraire la partie dynamique et le sang jeune d'une nation française dans laquelle nous les aurons intégrés. »
« J'affirme que dans la religion musulmane rien ne s'oppose au point de vue moral à faire du croyant ou du pratiquant musulman un citoyen français complet. Bien au contraire, sur l'essentiel, ses préceptes sont les mêmes que ceux de la religion chrétienne, fondement de la civilisation occidentale. D'autre part, je ne crois pas qu'il existe plus de race algérienne que de race française (...). »
« Je conclus : offrons aux musulmans d'Algérie l'entrée et l'intégration dans une France dynamique. Au lieu de leur dire comme nous le faisons maintenant : « Vous nous coûtez très cher, vous êtes un fardeau » , disons leur : « Nous avons besoin de vous. Vous êtes la jeunesse de la Nation » (...) Comment un pays qui a déploré longtemps de n'avoir pas assez de jeunes pourrait-il évaluer le fait d'en avoir cinq ou six millions ?... »
Étonnant, non ?
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1 En novembre 1962, il déclarait au journal Combat : « Je n’ai rien à cacher. J’ai torturé parce qu’il fallait le faire. » ► Retour au texte
Voir également :
En Algérie en 1957, « Jean-Marie Le Pen a torturé ». À l'air libre, vidéo publiée par Mediapart, le 19/01/2024. (47 min.)
et :
Les dernières confessions de Jean-Marie Le Pen sur la torture pendant la guerre d'Algérie. Publié par Le Monde, le 10/01/2025.